Guatemala : la transition démocratique en danger
Le pouvoir judiciaire qui cherche à invalider l'élection de Bernardo Arévalo a de nouveau perquisitionné les bureaux du Tribunal électoral.
La crise politique au Guatemala a connu un nouveau rebondissement ce samedi. Plusieurs membres du bureau du procureur général accompagnés de la police ont perquisitionné le Tribunal electoral pour s’emparer de documents liés à l’election présidentielle du 20 août dernier. Certains magistrats du Tribunal electoral se sont interposés mais ont été repoussés par la police. Après le départ de la police, Blanca Alfaro, une des magistrates du Tribunal electoral, expliquait comment tous les documents saisis par le Ministère de la Justice avaient été descellés et séparés de l’enveloppe plastique qui permet de les identifier, remettant ainsi en question leur authenticité.
Les actions menées par le Ministère de la Justice ce samedi confirment les inquiétudes autour de la transition démocratique au Guatemala. La victoire au second tour des élections présidentielles de Bernardo Arévalo le 20 août dernier avait certes surpris de nombreux observateurs mais aucun soupçon de fraude n’avait fait surface. Le Tribunal électoral avait validé quelques jours après les résultats de l’élection. Cependant, depuis sa victoire, Bernardo Arévalo et son parti Semilla font l’objet d’allégations de fraude par certaines élites du pays et notamment le bureau du procureur général.
Parmi les adversaires d’Arévalo, on peut citer la procureur général María Consuelo Porras, le directeur de l’unité spéciale contre l’impunité Rafael Curruchiche et le juge Fredy Orellana. Trois figures influentes du paysage politique guatémaltèque qui ont fait l’objet de sanctions par Washington ces derniers mois mais qui font aujourd’hui pression sur le Tribunal électoral et sur Bernardo Arévalo pour invalider les résultats de l’élection. Curruchiche avait demandé en août la suspension du parti Semilla ; une décision annulée quelques jours plus tard par le Tribunal électoral.
Le 12 septembre déjà, les procureurs de la république guatémaltèque avaient perquisitionné un bureau temporaire du Tribunal électoral pour saisir les urnes du premier tour de l’élection. Un acte sans précédent et vu comme la mise en péril du processus démocratique par de nombreux observateurs. Le président élu Bernardo Arévalo avait alors annoncé suspendre sa participation au processus de transition démocratique, dénonçant “un coup d’Etat en cours”.
Mercredi dernier, le président sortant Alejandro Giammattei annonçait que la transition prévue entre les deux hommes allait reprendre, dans les conditions souhaitées par Arévalo. Or, les événements de samedi laissent penser que le ministère de la Justice est bien décidé à contester les résultats de l’élection.
En visite au Mexique où il a rencontré le président Andrès Manuel Lopez Obrador, Bernardo Arévalo a de nouveau dénoncé “un coup d’Etat mené par Consuelo Porras, Curruchiche et Orellana”. Ce dimanche, les Etats-Unis ont eux aussi condamné dans un communiqué officiel les manoeuvres du Ministère de la Justice et ont réitéré leur soutien à Bernardo Arévalo.
L’élection inattendue de Bernardo Arévalo marque un tournant historique pour le Guatemala, pays gouverné par une élite conservatrice depuis le retour d’un pouvoir civil en 1985. Le président élu doit prendre ses fonctions le 14 janvier 2024. Une échéance qui paraît aujourd’hui très loin tant le Ministère de la Justice semble décider à s’y opposer. D’ici là, plusieurs scénarios sont donc à envisager. Si la situation ne s’apaise pas, il est en effet possible que Arévalo soit arrêté avant l’investiture, que son parti Semilla (qui a obtenu 14% des sièges du Congrés) soit suspendu définitivement ou bien que l’investiture soit perturbée, à l’image de ce qui s’est passé aux Etats-Unis ou au Brésil. Dans tous les cas, la démocratie au Guatemala semble ne tenir qu’à un fil.
Dans le reste de l’actualité
Argentine 🇦🇷
Le Sénat argentin a approuvé un texte de loi visant à supprimer l’impôt sur le revenu pour des millions de travailleurs. Mené par Sergio Massa, ministre de l’Economie et candidat à la présidentielle, le projet de loi est vu comme une mesure électoraliste qui pourrait peser sur les finances publiques. (MercoPress)
Le futur de la filière du lithium en Argentine, actuellement le quatrième plus gros producteur au monde, dépendra largement du prochain gouvernement. En effet, selon certains experts, le pays à le potentiel d’arriver à la deuxième place mondiale si les bonnes conditions sont réunies. (Bloomberg Línea)
Patricia Bullrich, candidate du parti Juntos por el Cambio à la présidentielle a annoncé qu’elle ne demanderait pas un nouvel emprunt auprès du FMI si elle venait à remporter l’élection présidentielle. (ZoneBourse)
Brésil 🇧🇷
Le taux de chômage du Brésil a atteint 7,8% sur la période juin-août 2023, soit le niveau le plus faible depuis début 2015 et le signe que l’économie brésilienne et le marché du travail continuent à profiter d’une dynamique positive. (Reuters)
L’excédent commercial du Brésil a atteint 8,9 milliards de dollars US sur le mois de septembre, un plus haut historique depuis que ces données sont mesurées (1989). (Nasdaq)
Opéré de la hanche vendredi, Lula a quitté l’hôpital dans un état stable ce dimanche. Le président brésilien devra rester chez lui durant plusieurs semaines et ne devrait pas voyager à l’étranger avant 2024. (Sud Ouest)
Chili 🇨🇱
Le taux de chômage s’est établi à 9% sur la période juin-août 2023 selon l’INE. Un chiffre en hausse consécutive depuis 10 mois. (El País)
Colombie 🇨🇴
La Banque centrale colombienne a maintenu son taux d’intérêt directeur à 13,25%, ce malgré les demandes du gouvernement et des entrepreneurs pour amorcer une baisse. (El País)
Equateur 🇪🇨
L’économie équatorienne a connu une croissance de 3,3% sur le second trimestre 2023 par rapport à la même période en 2022, à la faveur d’une augmentation de la consommation des ménages, des dépenses publiques et des investissements. (El Mercurio)
Mexique 🇲🇽
La Banque centrale mexicaine a maintenu son taux directeur à 11,25% pour la quatrième fois de suite lors d’une réunion la semaine dernière et a laissé entendre que cette “pause” pourrait se poursuivre. (Central Banking)
Selon un rapport del l’Organisation Mondiale du Tourisme, le Mexique est le pays le plus visité en Amérique latine et est aussi le sixième au monde en termes d’investissement directs étrangers dans le tourisme. (Mexico Daily Post)
Panama 🇵🇦
Face à une sécheresse qui dure, les autorités du Canal de Panama ont à nouveau réduit le nombre de traversées quotidiennes (passant de 32 à 31). La situation devrait durer jusqu’au début de l’année prochaine et perturber le commerce maritime mondial. (Reuters)
Pérou 🇵🇪
L’inflation annuelle s’est réduite en atteignant 5,4% pour le mois de septembre, un plus bas depuis deux ans. (Reuters)
La crise politique du début d’année et les conditions économiques difficiles poussent de plus en plus de jeunes Péruviens à quitter le pays pour trouver de meilleures opportunités professionnelles. (RFI)
Venezuela 🇻🇪
Le gouvernement vénezuélien a signé un accord avec l’entreprise indienne Jindal Steel & Power Co, accordant à cette dernière l’exploitation de la mine de fer près de Ciudad Piar. (Bloomberg)